Evolution de la CORRIDA
   

           C'est toujours avec beaucoup de conviction qu'on entend les vieux aficionados parler des corridas de l'entre 2 guerres. A cette époque, en effet, le toro de combat plus solide, moins noble, et moins suave donnait à la corrida le visage du courage et de l'émotion.
           Si l'on ajoute à cela le spectacle dur et prenant du Tercio de Piques au cours duquel les chevaux étaient très souvent mortellement blessés (même avec les premiers caparaçons), cela créait une atmosphère de combat, de lutte, et le souci artistique, bien qu'existant chez certains toreros ; était relégué au second plan.
La façon de toréer plus rude, plus frustre était admise par les aficionados. On était, d'ailleurs, beaucoup plus entre connaisseurs car la corrida n'avait pas encore touché le « Grand Public ».
          Actuellement et de façon indiscutable, le spectateur attend la FAENA DE MULETA, regardant un peu, au passage, la pose (rapide) des banderilles, pourtant très spectaculaire.
          Ces constatations étant faites, ajoutons que le « Grand Public », celui qui englobe les touristes, les vacanciers et les non-inités veut voir « LE MATA­DOR » (j'allais dire la vedette) faire de longues séries de passes et cela le plus près possible du toro.
          Passons maintenant de l'autre côté de la barrière. Nous y trouvons éle­veurs, empressas, toréros. Chez les premiers les toros sont élevés et nourris- avec des aliments modernes, ils font moins de kilomètres dans les « campos ». De là, provient la fai­blesse et le manque de résistance. En ce qui concerne, la caste (qu'il faut pourtant maintenir), on recherche surtout la suavité tant apprécies pour les faenas actuelles. Quand l'empressa (lisez l'organisateur) que désire-t-il, que le spectacle puisse satisfaire son public. Quatre bons toros dans une course sont un gage de succès. Un seul sortira noble et 5 autres difficiles, c'est un échec, et par la même, l'absence d'ambiance et trophées qui consacre la réussite d'une corrida. Quand au toréro qui possède une renommée, il est indispensable de l'avoir dans les grandes férias et dans toutes les plazas d'importance. Il est donc engagé en tout début d'année et signe un nombre de contrats qui garnissent sa saison.
          Il lui faut bien sûr des succès car son standing en souffrirait mais les enga­gements étant en poche, il n'a plus besoin de se « battre» au jour le jour.
          Les succès qui émaillent sa saison suffisent à maintenir son renom et sa valeur commerciale. D'ailleurs, voudrait-il se battre avec les toros rudes et difficiles qu'il ne le pourrait, peut-être pas? et ne serait pas ou peu apprécié par le « nouveau public » ?

Voilà donc le cycle bouclé.
          L'éleveur livre des toros jolis et suaves. L'empresa pense au succès populaire de sa course. Le toréro, espère le toro qui lui procurera le succès mais l'échec ne lui fait plus peur. D'où son renoncement parfois!!!
Le grand public attend la faena liée plaisante et serrée clôturée bien sûr par une estocade rapide (qu'importe la manière). Nier ces faits c'est nier l'évidence et aussi regrettable que cela soit pour les vrais aficionados, c'est une évolution qui a modifié profondément le déroulement de la FIESTA BRAVA.
          Mais la corrida reste pourtant et encore un magnifique spectacle que rien ne remplace. Parmi les toréros encore en exercice, on peut citer les noms d'hommes qui ont fait, ou font des carrières appréciés par les connaisseurs. L'ART d'un A. BIENVENIDA, la maîtrise d'un LUIS MIGUEL DOMIN GUIN l'aisance d'un CARLOS ARRUZA, le sang froid d'un LITRI, le métier d'un Aparicio, le courage d'un OSTOS, la finesse d'un ANTONETTE l'incomparable maestria d'un A. ORDONEZ, la vaillance d'un D. PUERTA, la classe d'un P. CAMINO, le classicisme d'un EL VITTI et plus près de nous les merveilleuses possibilités d'un LINARES sont, quand même, un bilan satisfaisant.
          Ceux qui ont vu ces toréros dans leur bonnes journées ne peuvent nier leurs qualités. Et puis la corrida reste toujours un spectacle unique en son genre. Non seulement le toro ne peut-être dressé, préparé (comme dans un numéro de cirque) mais n'ayant jamais été toréé, nul ne peut prévoir, ses réactions. C'est en fin de compte ce qui fait la beauté et l'imprévu du spectacle.
DON CLARO.