Alors... On MONTE !
 
   
 
Par un Bayonnais de Paris J.L. Garet
   
   

L'histoire est connue. En 1963, un groupe de copains décide de remettre debout l'Association Sportive Bayonnaise, disparue en 1939. Seulement les règlements fédéraux sont impératifs et précis. L'A.S.B. repart bien, mais en série inférieure. Le problème était d'en sortir, et le plus vite possible. Ce n'est pas chose si facile et d'autres, déjà, l'avaient éprouvé. Plus d'une fois, l'A.S.B. donna l'illusion de réussir et puis, un peu de malchance aidant, elle échoua au port. Jusqu'à la saison dernière, où l'équipe était amenée dans sa meilleure forme juste pour les matches capitaux. Le 12 avril, en battant Lormont, l'A.S.B. obtenait le droit d'opérer désormais en division d'Excellence et la phrase: « Alors, on monte? », qui était depuis sept ans la phrase de l'espoir, cessait d'être interrogative pour devenir exclamative. Cette fois, ça y était, on était monté pour de bon.
Satisfaction et récompense pour les dirigeants, le président Ducasse, Paul Lacassagne, Henri Lesca, Manuel Gonzalès, etc...; pour Félix Abéradère, que ses obligations professionnelles tiennent provisoirement un peu à l'écart, mais dont l'aide et le dévouement restent aussi efficaces que discrets; récompense pour les jeunes joueurs; pour de moins jeunes, comme Pierre Lajusticia ou ce Robert Lacassagne dont le retour à la pointe du combat des avants fut peut-être au printemps 1970 l'événement décisif.
Et maintenant? D'abord, nul ne veut sérieusement envisager que l'A.S.B. puisse retomber dans l'enfer d'une série inférieure. Tandis que Marcel Junquas, qui préside avec compétence et discernement à la Commission de Rugby, garde son habituelle sérénité, les moins optimistes ont la conviction que le club restera en tous cas dans la Division où il lui a été si difficile d'accéder. Les plus optimistes regardent plus haut, visant au niveau de la Division Fédérale. Après tout, il y a des précédents - et pas très loin de chez nous: Monein, par exemple.
Et, mon Dieu, quand on voit les effectifs au seuil de la saison qui vient, on se demande si l'espoir d'une nouvelle ascension est tellement chimérique. De rares annonces de retraite (?), pas de vrais départs: le fait est important parce qu'il prouve,que l'A.S.B. est un club où les joueurs se sentent bien. Par contre, de nombreuses arrivées ou rentrées. Alchutéguy, Arrégui, Hiriberry, que l'Aviron a eu l'élégance de laisser partir de bonne grâce, viennent opportunément durcir une ligne d'avants qui va encore être renforcée par des Fontan, Suzane, ou encore Gayon, du Stade Hendayais. Quant aux lignes arrière, elles reçoivent l'appoint de Aramburu, Landaburu, Pichon, Patrick Gonzalez, sans parler d'Alain Gonzalès et Mendibil, deux produits maison retour du régiment. Enfin a donné sa signature une foule de jeunes, ambitieux de sortir de l'anonymat. Car il n'y a pas que l'équipe première. Sait-on que le total des licenciés à l'A.S.B. dépasse largement la centaine? Qu'aux entraînement du Parc des Sports, les mercredis et vendredis soir, participent une soixantaine de Seniors ? Sait-on que Alain, Micots et Robert Lacassagne, entraîneurs respectifs de l'équipe première et des Juniors, ont été retenus pour le stage fédéral qui a lieu présentement à Paris? Que, outre ces deux équipes engagées dans le championnat national, il y a encore les réserves et les Cadets pour disputer les championnats régionaux soit quatre équipes au total? Sait-on bien aussi que l'aire géographique du recrutement intéresse tous les quartiers de Bayonne et déborde sur tous les environs?
Mais quoi? Dans le Bayonne de 25.000 habitants d'avant la guerre, deux clubs appartenaient à ce qui était alors la Division supérieure. Le Bayonne d'aujourd'hui a une population de plus de 50.000 habitants, avec dans cette population la nostalgie d'une grande époque, c'est-à-dire d'une grande équipe disparue depuis Jean Dauger. Et l'A.S.B. se prépare un nouveau siège social, qui aura pignon sur rue... Mais où que se réunissent ses dirigeants, on peut être sûr que leur réunion sera toujours une réunion de l'amitié. Cette amitié qui trempe dans les souvenirs communs. Ce n'est pas rien que de s'être connus en culottes courtes, d'avoir joué ensemble à la pelote contre les murs interdits, d'avoir couru Place de la Course, d'avoir fréquenté l'école qui ne s'appelait pas encore Jules Ferry.
Et on fait tant de choses, avec de l'amitié.
Alors, on monte?