Le Retour de l'Enfant Prodigue
Bien sûr, pour titrer ce billet j'ai plagié l'Evangile. Ce n'est donc qu'une parabole. Car « prodigue »... il m'eut été difficile de l'être, n'ayant jamais été riche, sinon de souvenirs et de fidèles amitiés.
Oui! Comme le disait une très belle chanson de ce temps-là, « mes souvenirs, pour moi, sont mes richesses »... Et c'est vraisemblablement ce qui, après une longue période « d'exil" imposé par les vicissitudes de l'existence, venu l'âge de la retraite, presque inconsciemment et, en tous cas, sans autre raison majeure, m'a ramené sur le sol bayonnais un peu comme le criminel qui, poussé par une force occulte, revient toujours, dit-on, sur les lieux de son forfait. Mais mon « forfait », à moi, étant évidemment d'une toute autre nature dont je ne puis que me féliciter.
C'est ainsi que, amicalement sollicité par quelques vieux amis retrouvés, me voici à nouveau au sein du Club dans lequel j'ai vécu la plus exaltante partie de ma jeunesse : celle où je fis mes premières armes de Dirigeant de la déjà vieille et glorieuse A.S.B.
C'était alors la laborieuse et difficile - mais combien attachante - période d'avant guerre où l'extraordinaire camaraderie, le dévouement de chacun, l'enthousiasme de tous, palliaient à la modestie des ressources et des moyens et... il faut bien le dire aussi à l'incompréhension et à l'ostracisme des puissants de l'époque. Car c'est un fait qu'en ce temps-là régnait l'esprit maléfique et discriminatoire qui veut que « selon que vous serez puissant ou misérable "... Chacun connaît la suite de cet adage, malheureusement encore trop souvent d'actualité. Et pourtant l'A.S.B. faisait front et tenait très honorablement sa place dans le concert des grands, inquiétant bien souvent les meilleurs.
Mais ceci est le passé et mon propos n'est pas de rappeler les querelles d'antan mais bien plutôt d'exalter l'esprit de club qui nous animait alors et que je voudrais tant voir régner à nouveau parmi les dirigeants et, aussi et surtout, parmi les joueurs de maintenant.

Cet amour du club, moteur indispensable de la réussite et des grandes tâches, chacun doit s'évertuer à le cultiver et à le propager. Mais surtout que l'on me comprenne bien: quand je parle d'amour et d'esprit de club je fais naturellement une distinction avec l'étroit esprit de clocher, chauvin et pernicieux qui, malheureusement, plaque des œillères sur les yeux de trop nombreux amis, supporters et même de certains dirigeants, Ce n'est certes pas cette mentalité-là que je veux exalter ici car je me fais une bien plus grande idée de l'image de marque d'un club, de son rayonnement et de son prestige, lesquels ne se mesurent pas toujours par le nombre de victoires sur le stade mais aussi par la manière de les obtenir et par son comportement vis à vis des autres et du public.
Faisant taire à regret le flot de réminiscences qui se précipite à mon esprit à l'évocation de ce passé lointain et qu'il serait vain, pour ma modeste plume, de prétendre faire revivre ici dans toute son intensité, je ne veux que saluer la mémoire des disparus qui m'étaient chers et que je n'aurais pas revus. Je ne les nommerais pas. Ce serait trop long et il me faudrait plusieurs colonnes pour parler d'eux comme j'aimerais le faire. Vous, les anciens retrouvés, vous les reconnaîtrez...
Tout ceci, sans vouloir jouer au moraliste attardé, pour exhorter la nouvelle génération des dirigeants, joueurs et compagnons de s'inspirer de l'exemple des « VIEUX,,; c'est-à-dire: apprendre à s'auto discipliner, savoir se serrer les coudes; multiplier les contacts entre eux afin de se mieux connaître et s'apprécier, se conduire en homme responsable et ne pas toujours incriminer les autres quand cela va mal. En un mot aimer son club et le servir. C'est ce que, avec mes modestes moyens, je me propose de faire puisque vous avez bien voulu m'admettre à nouveau parmi vous.

André RAGUIN.