Le soleil éclatait de lumière... La petite place
d'Espelette regorgeait d'une foule bigarrée, attirée là pour des raisons
professionnelles ou, simplement - c'était mon cas - par curiosité.
La « foire aux pottoks » s'annonçait bien
et la foule se bousculait à l'entrée des cafés, restaurants et autres lieux où
on a coutume de ne pas engendrer la mélancolie.
Soudain, vision fugitive, j'aperçus dans les nombreux
groupes qui se formaient pour l'achat éventuel, du « petit roi » du
Pays Basque, mes deux amis, Optimard et Pessimard, grands amateurs de... bonne
chère et de rugby.
Pour une surprise... ce fut une surprise. Après les
congratulations d'usage, j'observais mes deux amis. Le premier, plus rondouillard
que jamais, le béret, mis négligemment sur l'occiput, semblait sortir de l'une
de ces publicités murales, avec sa bonne tête et ses yeux rigolos... « Je
sais tout... » ou presque, me confia-t-il en catimini.
Le second, encore plus maigre que l'an dernier, avec
son visage ravalé et son nez pointu que n'aurait pas désavoué Cyrano de Bergerac.
Correctement vêtu, mais dans un vêtement trop large pour lui, il avait autour
du cou une cordelette de piments d'Espelette, et un parapluie - allez savoir
pourquoi, avec ce soleil étincelant accroché par le bec, dans le dos du veston.
Comme je m'étonnais de cet accoutrement quelque peu
insolite, il me confia: « Motus: c'est un secret»!... Pour moi, après
maintes réticences, il avoua: « Je fais macérer, ces piments dans de
l'alcool à 90°, j'y ajoute un peu de cette herbe magique - mais là il n'y
eut rien à faire... pour en connaître le nom - je garde le tout, en l'état,
durant six mois. Puis je bois un verre à liqueur, avant chaque repas. L'effet
est formidable, « ça » guérit tout, « ça » réveille les morts. Je t'en donnerai, ajouta-t-il,
dans un pauvre sourire, un flacon. Tu en feras l'expérience sur quelques gars
de la « Battite » qui me semblent manquer de « gnac »
ou de cœur à l'ouvrage.
Et voilà, conclut-il, triomphalement. C'est tout...
"
On sentait Optimard bouillir d'impatience. Encore et
toujours, Pessimard avait bafouillé son énorme plaisanterie, ce qu'il appelle,
lui, « parler pour ne rien dire ». Aussi lança-t-il, avec véhémence
: « Si on jouait à « Remue-Méninges », si on parlait un peu
de ce grand mouvement qui risque deux choses: 1°-n'être qu'un ballon-sonde
pour rire, 2°- être très sérieux et laisser entrevoir des côtés, pas toujours
réjouissants, pour le rugby orthodoxe...
Des lèvres de Pessimard, à peine entr' ouvertes, il
est vrai, il connut la réponse: « Moi... je fais confiance à tonton Albert »
Il saura trouver la parade. Il saura si le besoin s'en fait sentir se transformer
en Tonton-flingueur. Car celui-là, c'est un tout bon... surtout s'il consent
à redescendre un peu sur terre et à éviter des attaques intempestives, comme
la mise au « placard » d'un certain Spanghero ou la « Don Quichottesque »
offensive pour un voyage en Afrique du Sud.
« C'est un tout bon... je le répète parce que je
le pense, mais de grâce, que Tonton laisse de côté ses petites musiquettes,
ces « çonneries » de quatre sous... même si on peut les écrire sans
une cédille... sous le C "...
Et il parlait... parlait... en solo, s'écoutant luimême.
Si le Lord en question a beaucoup de « Chorus »...
il faudra qu'il les montre . .
Optimard bouillait d'impatience « Si on parlait,
pour une fois que l'on se voit... un peu de l'A.S.B. »... au lieu de ce
rugby pro !.
« Est-ce vrai, que le capitaine, Monsieur 50 %
a quitté, pour des raisons professionnelles, très valables certes, ses camarades,
juste au moment où les dirigeants avaient réussi le tour de force d'apporter
un renfort très sérieux à l'équipe 1... "
Puis, il éclata, ce qui est très rare chez cet optimiste
invétéré.
« Non! je ne peux pas le croire... Gérard n'est
pas un lâcheur. Il fait partie d'une haute lignée asbéiste : son grand-père,
son oncle, son père, son frère, et ses trois beaux-frères se sont illustrés
sur le terrain. Il reviendra je vous en donne l'assurance... dès que les circonstances
le permettront. L'A.S.B. peut prétendre à la deuxième division... avec son
apport, cela sera plus sûr! »
Puis il me donna la parole:
« Je prends le risque de me faire écorcher vif... C'est
tout au moins ce qui m'est promis par quelques-uns de mes amis... Mais une
question me tient particulièrement à cœur: « Pourquoi a-t-on construit, au
Grand Basque un Stade Municipal, non fiable au rugby? Pourquoi l'a-t-on attribué
à la seule section du club local, aussi prestigieux soit-il ?.. Pourtant,
n'a-t-on pas demandé, à tout le monde, y compris aux gens de l'A.S.B... de
mettre la main au gorosset ? Ce qui a été fait le plus correctement du monde
»...
Pour bien me faire comprendre, il n'est pas question
d'abandonner le Parc Municipal de Saint Léon pour aller porter ses pénates
au Grand Basque. Ce stade « honnête» dans sa construction, pourrait servir
de repli aux rugbymen de tous crins. Par les hasards de sa vocation et de
son calendrier il se trouve que le récent Parc Municipal est le plus souvent
libre le dimanche... alors que les joueurs de rugby se trouvent dans l'obligation
d'utiliser des parcs sur lesquels il est impossible de faire la moindre recette...
Pour sa part l'AS.B., n'utiliserait ce stade que deux
ou trois fois l'an. Aussi je demande, avec insistance, à mes vieux copains
de la majorité, Robert et Marcel, ainsi qu'à mes amis de la minorité de se
pencher sur la question.
Le roi Henri, quatrième du nom, avait dit « Paris vaut
bien une messe », je serais heureux que « lou Noste » prenne ma requête en
considération. Ainsi, le 18 septembre l'AS.B. devra jouer au pied de la tour
de Sault, un match de Coupe de France de rugby, sans la moindre «entrée» payante
possible. Ne serait-elle pas mieux... à Saint-Esprit?
Déjà les bonnes volontés s'émoussent. On ne trouve
plus ces « bénévoles» qui ont tout fait pour le renom de la ville. Ils sont
fatigués.
Bayonne, qui a rejeté à tout jamais les querelles sportives,
vaut mieux que cela... Messieurs du Conseil, donnez à l'AS.B. un peu d'air.
Elle ne demande pas grand-chose! Se replier, en des circonstances identiques,
dans ses terres d'origine...
Seulement si les circonstances du calendrier
l'exigent...
Merci pour... Elle!
FLAG.