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D'ACCORD, PAS D'ACCORD

 

Ambiance des jours de fête dans ce "coin des hal­les", investi par ces "squatters" bayonnais d'un autre âge.

Il ne manquait vraiment que les' 'tambours et les trompettes" de la "Bayonnaise" pour donner, à cette réunion de retraités, le bon chic, bon genre, que méri­tait pareille initiative.

Dans cette maison, ouverte aux quatre vents, il nous faut l'avouer, on y venait surtout pour admirer la fres­que murale dei senor Marcel, dont le talent et le goût s'illustraient bien dans cette composition de haute tenue et remettait au goût du jour la tendance présente qui se manifeste pour "l'affiche de tous les temps" ; Marcel, un "pintador-decorator" de haute volée.

Mais on sentait vraiment, au frémissement qui secouait la foule, que le point d'orgue attendu de tous, était le moment où on allait, enfin, parler "RUGBY". La bouche à oreille avait bien fonctionné, car se mur­murait la venue de Pessimard et Optimard qui faisaient "autorité" en matière d'Ovalie.

L'assistance se "musclait" toujours davantage. On y voyait les "bleus", de loin les plus nombreux, qui arboraient un sourire long comme ça, .et large comme une tranche de jambon. La pêche avait été bonne. De nombreux "noms" étaient avancés... Le comité avait réussi là, un gros coup qui préludait bien de la saison prochaine.

A l'opposé, il y avait pour les "rouges", un "mahous" qui avait réponse à tout, et opposait à la kyrielle de joueurs annoncés dans le camp "ennemi", quelques rentrées de haut niveau. D'ailleurs il n'y avait plus longtemps à attendre. Le "planchot" serait bien­tôt le juge suprême...

Les "blancs", par contre, faisaient grise mine. Ren­trées et sorties s'équilibraient... On regrettait notamment le "départ" de l'arrière, d'un trois-quart aile, et d'un troisième ligne d'avenir. On enregistrait, par con­tre, la venue d'un véritable "bijou" dans les lignes arrières, et de quatre avants, jeunes et bien charpentés. Chez les "seconds couteaux" bayonnais, on voit tou­jours le même système, on n'a pas l'argent nécessaire, ou les "sponsors" si utiles pour s'offrir de grosses vedettes, mais on a le sentiment de présenter toujours des équipes de qualité. L'A.S.B. veut rester dans la droite ligne d'une formation sérieuse chez qui il fait bon vivre.

La récompense lui est venue des instances fédérales qui lui ont accordé pour la troisième fois consécutive un brevet de bonne conduite, accompagné d'une coquette somme d'argent. Le fait, à notre connaissance, est sans doute unique dans le "Landerneau" sportif. Il y avait aussi un fidèle de ces réunions qui repré­sentait les "noirs", et avait en eux une confiance abso­lue. On lui avait pris, les meilleurs... Mais il avait tel­lement l'habitude. Les "gros" et les "grands" pou­vaient encore, venir à Pique, ou sur le nouveau terrain municipal, ils trouveraient à qui parler... Il en "sou­riait" à l'avance. Le B.S. aurait encore de bons tours à jouer.

A ses côtés, un "vert", qui avait défrayé la chroni­que la saison dernière. Il savait simplement que Bernard

 

DUPRAT n'entraînerait plus la saison prochaine. De même, le grand espoir du club, 3" ligne d'avenir, pas­sait avec armes et bagages chez le voisin, plus huppé... Deux gros trous à boucher... ce qui n'empêchait pas notre ami "vert" de fredonner: « Avec la garde mon­tante, nous arrivons nous voilà, sonnez trompettes écla­tantes, tara tata, ta, ta, ta, ta... »

Les décibels volaient de plus en plus haut dans le "prétoire". C'est le moment que choisit "Martin" pour réclamer le silence, et donner la parole à Optimard, qui fut loin de se faire prier.

« Messieurs, vous n'êtes pas sans savoir que le rugby va prendre une tournure nouvelle avec le champion­nat de "l'élite" ». Le Président FERRASSE en a pro­fité pour prendre à son compte le fameux article 49/3, et présenter son projet, en désignant "arbitrairement" les heureux élus. Déni de justice pour les uns, (les plus nombreux), coup d'épée dans l'eau pour les autres; enfin le Président FERRASSE avait à écouter une par­tie de son opinion qui réclamait un resserrement "en tête". Finies les pantalonnades du passé, qui voyaient des scores ridicules de 40 et 50 points se transformer en victoires aux matches retour! Mais le bon Président a déclaré, au congrès de Dax, que l'expérience en cas d'échec, ne serait pas poursuivie et que l'on reviendrait à la case départ.

On ne pouvait mieux dire pour couper court à toute polémique... Un bon Gascon... vaut bien un bon Normand...

Bien protégé par un triple cordon de spectateurs attentifs au plus haut point à l'étrange déclaration d'Optimard qui vraiment "ne se sentait plus", Pessi­mard écoutait, narquois, attendant patiemment son heure. Elle vint, enfin...

« Tout ça n'est que de la rigolade, une immense rigo­lade. Je suis prêt à parier un jambon contre un sou espagnol que le fameux championnat de "l'élite" durera ce que durent les roses... Je n'en veux pour preuve que l'expérience tentée voici quelques soixante ans. On vit là, les meilleurs clubs de France se regrou­per et tenter l'aventure. Ce fut un fiasco complet.

Le bon peuple de France avait dit non, tout de suite, à cette U.F.R.A. qui réunissait pourtant tous les gros bras du Rugby. Il en sera de même ce coup-ci. Notre joli sport est avant tout "républicain" ; c'est de la masse que doit sortir l'élite. Il faut annoncer la cou­leur. Le Rugby est, avant tout, un sport populaire, et doit le rester. Vouloir changer en cours de route le système des mutations c'est se prêter à l'injustice la plus criante.

Le championnat de l'élite (modèle 86-87) ne durera pas autant que le marché de Dax... C'est un Vieux de la Vieille qui vous le dit.

Rugby... Rugby de toujours, ne peut supporter tous les caprices de nos dirigeants qui changent tous les ans le modèle d'emploi... Il mérite un peu plus d'attention, et davantage de sérieux... »

 

FLAG (juillet 1986)